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Montres IWC : tour d’horizon des complications et des innovations

Par Tim Breining
27 septembre 2024
6 minutes
Pellaton Movement 2

Lors du passage au nouveau millénaire, IWC se targuait d’être la marque de montres des hommes et l’affichait clairement dans ses campagnes publicitaires de l’époque, aussi légendaires que tristement célèbres. Un quart de siècle plus tard, cette position difficilement acceptable aujourd’hui est de l’histoire ancienne. Les montres IWC comptent un nombre non négligeable de fans féminines – et la marque est même allée jusqu’à créer des affiches sur mesure pour les « Swifties » à l’occasion de la tournée mondiale de Taylor Swift à Zurich. Si l’image et l’identité de la marque ont sensiblement évolué au fil des ans, le succès d’IWC s’appuie encore et toujours sur les mêmes codes, les mêmes modèles iconiques et les innovations techniques. Dans cet article, nous avons souhaité revenir sur les innovations techniques et les complications caractéristiques qui ont jalonné l’histoire IWC.

IWC Ingénieur IW328901
L’IWC Ingenieur Automatic

Le remontage Pellaton

Impossible de parler d’IWC sans mentionner Albert Pellaton. Après avoir été formé et avoir travaillé comme constructeur pour la prestigieuse société Vacheron Constantin, il est entré chez IWC, où il a occupé le poste de directeur technique de 1944 à 1966. De nombreuses familles de calibres et modèles de montres ont vu le jour sous son égide, mais il doit avant tout sa réputation d’inventeur horloger de génie à son système de remontage automatique bidirectionnel breveté. Ce mécanisme, désormais connu sous le nom de remontage Pellaton, est toujours utilisé dans la famille de calibres 52000 d’IWC. Certes, la présence d’un remontage automatique n’est généralement pas considérée comme une complication, mais il serait dommage de priver le remontage Pellaton de la gloire qu’il mérite à cause de ce petit détail. La nouveauté de cette invention ne résidait pas dans la fonction de remontage bidirectionnel en elle-même, puisque Felsa l’avait déjà lancée huit ans plus tôt avec le Bidynator. Felsa a pour ce faire opté pour une construction qui demeure la plus courante à ce jour, avec deux roues de minuterie, comme le font les mouvements de grande série ETA 2824-2 ainsi que le Sellita SW-200 qui en est dérivé. Avec son remontage, Pellaton a imaginé une solution totalement différente, à mi-chemin entre la suringénierie et l’ingéniosité.

Le mécanisme de remontage Pellaton.
Le mécanisme de remontage Pellaton. La came 17 tourne avec le rotor automatique, les cliquets font systématiquement tourner la roue de remontoir 7 dans le sens horaire. Source : brevet DE 882227

En même temps que le rotor automatique, une came excentrique en forme de cœur fait tourner une grande bascule autour d’un palier, en fonction de la position angulaire du disque en forme de cœur et donc du rotor. Deux rouleaux en rubis entourant la came en forme de cœur assurent alors un guidage sans friction, mais sûr, de la bascule.

Sur la bascule, deux cliquets sont par ailleurs respectivement montés sur ressort contre une roue de remontoir pourvue d’une denture de blocage. Le mouvement du rotor, et donc de la came en forme de cœur, met la bascule en mouvement, ce qui guide les cliquets le long de la roue de remontoir. En raison du décalage d’environ 90° des cliquets, l’un des cliquets glisse toujours librement sur les dents, tandis que l’autre s’engage dans la roue et la fait tourner dans le sens des aiguilles d’une montre.

La roue de remontoir et les cliquets en céramique sombre sont bien visibles sur le calibre 52615 de la Portugieser Calendrier Perpétuel.
La roue de remontoir et les cliquets en céramique sombre sont bien visibles sur le calibre 52615 de la Portugieser Calendrier Perpétuel.

L’interprétation moderne du remontage Pellaton dans la famille de calibres 52000 est fidèle au concept original, à l’exception du choix des matériaux, puisque les cliquets et la roue de remontoir sont aujourd’hui en céramique de zircone résistante à l’usure.

J’ai mentionné plus tôt que le remontage Pellaton peut être considéré comme présentant un certain degré de suringénierie. Je dis surtout cela parce qu’il existe un système de remontage automatique nettement simplifié qui fonctionne de manière similaire. Il s’agit du fameux « Magic Lever » de Seiko, inventé en 1959, qui recourt à un concept beaucoup plus simple sur le plan technique. Difficile de savoir quelle conception est supérieure, car cela nécessiterait une évaluation précise de l’efficacité, de l’angle mort lors du changement de sens de rotation et, bien sûr, de la résistance à l’usure. Il est toutefois intéressant de noter que Valfleurier, le fabricant de mouvements de Richemont qui travaille également pour IWC, mise en partie sur une construction typique de Seiko. Chez IWC, on retrouve ce remontage à cliquet simplifié dans la famille de calibres 69000.

Mais plutôt que de nous perdre dans des détails et des spéculations, réjouissons-nous du fait qu’IWC continue à entretenir et à améliorer ce mécanisme unique. Car en fin de compte, ce que nous recherchons dans les montres, c’est surtout la fascination, et non l’uniformité.

L'IWC Portugieser Chronographe avec calibre 69355
L’IWC Portugieser Chronographe avec calibre 69355

Le calendrier perpétuel de Kurt Klaus

Kurt Klaus a suivi les traces d’Albert Pellaton en rejoignant l’entreprise en 1957. Son nom est connu même de celles et ceux qui ne s’intéressent pas particulièrement aux montres IWC pour être apparu, à l’âge de 85 ans, dans une campagne de publicité créative et très remarquée menée par la marque en 2019. Cette campagne était axée sur le contraste entre une « smartwatch » moderne et une construction mécanique – mais non moins « intelligente » – de Kurt Klaus : son calendrier perpétuel. L’IWC Da Vinci Calendrier Perpétuel, présentée en 1985 et dont le design est résolument ancré dans les années 1980, n’était pas seulement remarquable par son ambition technologique. Elle faisait plutôt partie des garde-temps emblématiques de la renaissance des montres mécaniques dans les années 1980. Contrairement à aujourd’hui, lancer une nouvelle construction mécanique complexe sur le marché était loin d’être évident à l’époque. Mais le pari s’est avéré payant et c’est ainsi que la Da Vinci Calendrier Perpétuel est devenue un succès commercial et l’un des fleurons de la marque.

L'IWC Da Vinci Calendrier Perpétuel
L’IWC Da Vinci Calendrier Perpétuel

Mais qu’est-ce que cette montre avait de si spécial sur le plan technique ? Après tout, les montres-bracelets étaient équipées de calendriers perpétuels depuis plus de trois décennies déjà. La réponse est que la conception de Klaus facilitait considérablement son utilisation, et par conséquent le quotidien de son ou sa propriétaire, bien que cela ne soit pas visible sur la montre. En effet, à l’époque comme aujourd’hui, les calendriers perpétuels qui ne sont pas suffisamment remontés nécessitent des réglages complexes. Cela s’effectue souvent à l’aide de correcteurs, et la montre doit même être confiée à un horloger dans certains cas. Soyons honnêtes : quel est l’intérêt d’un calendrier perpétuel censé fonctionner sans réglage pendant une voire plusieurs centaines d’années, s’il nécessite une intervention coûteuse au moindre arrêt ? Kurt Klaus a donc réalisé le module calendrier avec 81 composants qui affichent la date, le jour, le mois, l’année et les phases de lune et peuvent être corrigés par simple rotation de la couronne. Ce système permet certes uniquement d’avancer la montre, mais c’est généralement ce que l’on doit faire lorsqu’une montre s’est arrêtée. Et si vous avancez trop la date par inadvertance, il suffit d’arrêter la montre et d’attendre que le jour en question arrive. Aujourd’hui encore, IWC intègre des calendriers perpétuels suivant le principe imaginé par Kurt Klaus dans de nombreux modèles, y compris aux côtés d’autres complications. Dévoilée par la marque en 1990, l’IWC réf. 3770 Grande Complication alliant un module calendrier, une répétition minutes et un chronographe dans une montre-bracelet en est un impressionnant exemple.

Montres IWC : grandes complications et autres garde-temps marquants

Depuis la référence 3770, IWC a régulièrement présenté des montres particulièrement complexes. Ainsi, la Grande Complication s’est enrichie d’une rattrapante et d’un tourbillon volant dès 1994 avec la Il Destriero Scafusia. Plus récemment, en 2011, un modèle autre a fait sensation : la Sidérale Scafusia, une grande complication dotée de plusieurs fonctions remarquables et rares. Parmi celles-ci figure notamment un tourbillon à force constante qui, après un certain temps de fonctionnement, se découple automatiquement en raison de la diminution de la réserve d’énergie dans le barillet et permet à la montre de continuer à fonctionner à la fréquence effective du balancier de 2,5 Hz.

La Sidérale Scafusia
La Sidérale Scafusia

Nous ne nous attarderons pas ici sur les nombreux affichages astronomiques au recto et au verso de la montre, ni sur l’affichage du temps sidéral. Le responsable de la recherche et du développement de l’époque, Jean-François Mojon, qui s’est ensuite mis à son compte en créant la société Chronode, spécialisée dans la fabrication de calibres, a joué un rôle déterminant dans cette construction et est devenu une figure incontournable de la haute horlogerie.

En 2024, la Portugieser Eternal Calendar marque l’avènement d’une complication totalement inédite qui combine un calendrier perpétuel séculaire avec des phases de lune incroyablement précises. Le mécanisme du calendrier perpétuel séculaire est suffisamment sophistiqué pour prendre en compte les exceptions particulières telles que les années bissextiles du calendrier grégorien et sauter trois années bissextiles au cours des 400 prochaines années. Les phases de la Lune vont encore plus loin et offrent une précision absurde de 45 millions d’années, obtenue par le calcul exact du réducteur qui actionne les disques lunaires.

Une chose saute aux yeux dans l’histoire d’IWC : de nombreux futurs grands noms du développement de mouvements horlogers s’y sont formés et s’y sont succédé. S’il est impossible de prédire si cette tendance se poursuivra pour IWC, les conditions devraient toutefois être réunies tant qu’elle approvisionnera le marché en montres très complexes en plus des modèles simples à trois aiguilles dotés de mouvements Valfleurier.

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À propos de l'auteur

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Tim Breining

Je me suis intéressé aux montres à partir de 2014, pendant mes études d'ingénieur. Puis cette curiosité s'est transformée en passion. Comme mon université et le siège …

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