Tout amateur de montres ayant la chance de visiter Tokyo se doit de faire un détour par le musée Seiko, dans le quartier de Ginza. Nous sommes de retour de notre petit périple au pays du soleil levant et y avons passé un excellent séjour ! La nourriture était incroyable, les Japonais se sont montrés très sympathiques avec nous et notre équipe a même été abordée en pleine rue pour apparaître dans une émission de télévision japonaise – mais c’est une autre histoire. Je souhaite aujourd’hui vous raconter l’une des journées les plus intéressantes de notre séjour à Tokyo, surtout pour les fans de montres que nous sommes : la visite du musée Seiko.
Le musée Seiko est un bâtiment à plusieurs étages qui retrace les multiples facettes de l’histoire du géant de l’horlogerie, de sa fondation à nos jours. Son adresse dans le quartier de Ginza est très proche du flagship de Seiko ainsi que de ses autres boutiques, de quoi vous occuper pendant de nombreuses heures.
Les montres de poche fondues du musée Seiko
La première chose qui a attiré mon attention est la pile de montres de poche fondues, qui ressemble à une sculpture de Giacometti. Toutes ces montres datent de 1923 et ont été récupérés dans l’usine Seikosha après le séisme de Kantō. Les tremblements de terre ne sont pas rares au Japon et celui-ci a provoqué des dégâts particulièrement importants.
Les montres de poche appartenaient à des clients qui les avaient envoyées à l’atelier de réparation de Kintarō Hattori, le fondateur de la concession horlogère K. Hattori & Co. et de Seikosha, qui deviendra plus tard Seiko. Kintarō a alors fait un geste commercial inédit en remplaçant chaque montre de poche endommagée lors du séisme par un exemplaire neuf. Un mois plus tard, K. Hattori & Co. reprenait son activité de vente de montres en gros et Kintarō se remettait à fabriquer les garde-temps Seikosha dans un atelier temporaire. Environ un an plus tard, alors que les machines tournent à plein régime et que l’entreprise fait l’objet de nombreux articles positifs dans la presse, Kintarō lance la première montre-bracelet portant le nom de Seiko.
Cet amas de métal fondu symbolise la manière dont Seiko est littéralement parvenue à renaître de ses cendres pour devenir la grande marque qu’elle est aujourd’hui, terminant ainsi cet événement tragique sur un happy ending.
Pièces originales récupérées dans l’usine Seikosha après le séisme de Kantō.
Le wadokei, un hommage au cycle saisonnier
Il m’arrive parfois d’oublier que le calendrier que nous connaissons, avec ses intervalles réguliers de secondes, minutes, heures et jours, n’est pas appliqué dans le monde entier. Le Japon a par exemple adopté assez tardivement un système fixe de 24 heures et le musée Seiko possède une belle collection d’horloges fonctionnant selon le cycle saisonnier japonais.
Avant que le Japon n’adopte le système de calendrier grégorien en 1873, il s’appuyait sur les wadokei, des horloges japonaises traditionnelles suivant un cycle saisonnier. La plupart des mécanismes de ces appareils venaient d’Europe, mais la façon dont ils affichaient le temps était typiquement japonaise et très compliquée.
Dans le cycle saisonnier, il existait six unités de temps pour le jour et six pour la nuit, connue chacune sous le nom de toki. La durée des saisons n’étant pas fixe, les durées de chaque toki, de chaque jour et de chaque nuit changeaient constamment. Comme tout fan de Grand Seiko le sait, le Japon compte beaucoup plus de saisons que les pays occidentaux (24 pour être précis). Les propriétaires de ces horloges wadokei devaient donc constamment ajuster la vitesse de fonctionnement et la position des aiguilles sur le cadran. Un véritable exploit quand je pense que certains se plaignent de devoir remonter leur montre mécanique tous les matins !
Les trouvailles vintage de Seiko
N’oublions pas les trouvailles vintage très originales exposées au dernier étage du musée Seiko. Vous y trouverez une panoplie de chronographes colorés ainsi que le chronographe cinétique favori de Jay Leno, avec ses quatre cadrans séparés. Vous pourrez également y admirer des horloges dédiées à des personnages, par exemple Godzilla et Ultraman, ainsi que la montre Seiko TV de 1982 qui permettait aux porteurs de « regarder » la télévision sur le petit écran de leur poignet. Cette technologie n’a pas vraiment rencontré le succès escompté et il est vraiment amusant de retomber sur cette capsule temporelle des années 1980.
Vous y verrez également de nombreuses montres illustrant la Grammaire du design rédigée par Taro Tanaka, qui fait la belle part aux angles nets et aux éléments de design épurés. J’ai passé plusieurs heures à contempler des montres étranges qui ne cherchent absolument pas à suivre les règles !